Pour une juste cause by Vassili Grossman

Pour une juste cause by Vassili Grossman

Auteur:Vassili Grossman [Grossman, Vassili]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
ISBN: 9782253157816
Éditeur: L’Âge d’homme
Publié: 2008-01-01T00:00:00+00:00


20

Quittant sa maison et ses conditions de vie habituelles, Serioja se trouva au milieu d’étrangers, connut des rapports humains dont il n’avait pas idée et des privations physiques éprouvantes.

Même les adultes expérimentés, lorsqu’ils se trouvent dans une situation difficile, se rendent compte que beaucoup de leurs opinions changent et que leur expérience de la vie, leur connaissance des gens se révèlent insuffisantes dans ces conditions nouvelles, particulièrement dures et insolites. Dès les premiers jours, Serioja sentit combien la vie ne ressemblait pas à ce qu’on lui en avait dit à l’école, à la maison et dans les livres, ni à ce qu’il en avait pensé à partir de ses propres et modestes observations. Mais le plus étonnant fut que peu à peu, avec le temps, lorsqu’il se fut habitué à l’immense variété des nouvelles sensations, bouleversantes et inattendues, lorsqu’il eut connu la fatigue et que ses oreilles eurent absorbé de multiples jurons méchants ou débonnaires, lorsqu’il eut compris toute la simplicité des désirs et des mœurs des soldats, subi la dure autorité du sergent et de l’adjudant, il sentit que son monde spirituel avait résisté, qu’il ne s’était pas décomposé, qu’il tenait bon. Ce qu’il avait reçu à l’école de ses professeurs et de ses camarades, ce que la vie et les livres lui avaient appris, le respect du travail, l’amour de la vérité, de la liberté, n’avait pas été détruit par la tempête de la guerre lorsqu’elle s’était emparée de son jeune cœur et de son esprit. Il était étrange d’imaginer la tête blanchie de Mostovskoï, les yeux sévères et la collerette blanche de sa grand-mère ici, dans la poussière de la route, parmi les cris des officiers et les conversations nocturnes des soldats. Mais la ligne de sa vie spirituelle qu’il avait toujours suivie n’en fut pas brisée ni même déformée, au contraire, elle se tendit comme un ressort et demeura bien droite.

À mesure qu’ils se rapprochaient du front, le groupe voyait ses meneurs et ses célébrités changer rapidement. Pendant les premiers jours, où personne ne comprenait rien à rien, où les soldats logeaient dans les casernes et où les exercices n’étaient pas encore bien rodés, où le temps se passait à remplir et à vérifier les listes, où les discussions creuses et les demandes de permission occupaient tous les loisirs, Gradoussov, désinvolte, habile et débrouillard, tenait le haut du pavé.

Dès l’heure de son arrivée à la caserne, Gradoussov avait dit à plusieurs reprises avec conviction :

— Je ne resterai pas longtemps dans cette compagnie, je me procurerai un ordre de mission.

Et il avait commencé en effet à chercher des moyens de quitter la compagnie, et ceci avec un calme savoir-faire ; il avait des connaissances partout : à l’état-major des milices populaires, et à celui du district, et aux sections économique et sanitaire. Ayant obtenu une permission de quatre heures pour se rendre en ville, il en était revenu avec du beau papier à lettres et des crayons pour le secrétariat de l’état-major du régiment. À l’adjoint



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